dual #15

« les possibles – écarlate sans cadmium », aquarelle 21 x 33,5 cm. 

Joëlle Bondil


Comment sais-tu que c’est une île, si tu n’en n’as pas fait le tour. Il disait cela,sa première phrase au matin alors que j’étais assis, lui debout, le soleil dans le dos, en face de moi. Il faudrait en faire le tour en une seule fois, ajoute-t-il. Je hasarde : sans rencontrer la nuit. Il hésite, il acquiesce. Il baisse la tête pour la relever et brièvement sourire. Il court, il ne peut que courir, tout de suite au-delà de la terrasse, buissons, le pli de l’herbe, le vallon. Quand il revient, je suis assis, je n’ai pas bougé, le soleil s’est élevé, des gouttes de sueur sur son front : les compter, ce serait savoir le nombre de ses années. Ses traits sont nets. Il raconte. Il y a encore une mare, une seule, la dernière. Elle sera bientôt flaque, de la taille d’un chien, d’une main. Il a encore vu le ciel à ses pieds, cerné par la terre sèche. Il dit, comment savoir si l’île est de terre ou de mer.